samedi 8 octobre 2011

THE OPPRESSED dans le JPB

Culture

"La musique Oi ! est une protestation de la classe ouvrière"

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08/10/2011
Carole SUHAS
Entretien avec Roddy MORENO / Chanteur et guitariste du groupe gallois The Oppressed
Le raccourci entre skinheads et violence est très vite fait. Beaucoup trop vite, en réalité. Les skinheads, créateurs de la musique punkstreet et de la Oi ! sont des enfants du reggae, celui de Derrick Morgan, Laurel Aitken ou bien Desmond Dekker, qu’il soit rock-steady ou early-reggae, autrement appelé skinhead reggae pour coller à la culture de la classe ouvrière britannique. Le reggae, ce genre qui a donné sa forme contestataire a beaucoup d’autres styles, comme le punk ou le ska.
Dans les années 1980 la Grande-Bretagne connaît l’explosion Oi !, le son des skinheads des quartiers populaires. Et avec elle l’inévitable émergence des “boneheads”, prônant la suprématie de la race blanche (“White Power”), qui provoquent une réaction chez les groupes skinheads qui s’emparent des idéaux antifascistes de leurs pairs états-uniens.
The Oppressed est l’un des premiers groupes britanniques à se proclamer antifasciste et avec lui toute une tripotée de skinheads qui portèrent à son apogée le mouvement Oi ! Si l’on parle d’eux maintenant, c’est que The Oppressed sévit encore, avec un tout récent EP intitulé Antifa Hooligans, et sera surtout présent à Sare ce soir, pour une soirée antifasciste. Roddy Moreno, chanteur du groupe, raconte ce mouvement populaire des années 1980 en Grande-Bretagne dont il fut l’un des protagonistes.
Que pouvez-vous dire de la culture skinhead des années 1980 en Grande-Bretagne, et qu’est-elle devenue aujourd’hui ?
Les skinheads des années 1980 étaient du pain frais. Les skinheads se sont emparés du cœur de la rébellion punk et ont donné naissance à la musique Oi !/streetpunk. Le genre est devenu plus militariste, mais le style originel est resté le même. Les skinheads Sharp/Rash sont apparus car le White Power des “boneheads” (branche des skinheads amatrice de punk/Oi !, mais à tendance néonazie) a volé notre culture et nous devions nous y opposer. Dans notre musique, il a toujours été question de rigolade et d’avoir voix au chapitre. Certaines chansons parlent de football, de boissons, etc., et d’autres de lutte contre le fascisme, de police et de gouvernement.
Justement, que représentent les idéaux Sharp (acronyme de Skinhead Against Racial Prejudice, skinheads états-uniens luttant contre les préjudices raciaux, en opposition aux boneheads d’extrême droite) pour vous qui les avez rapportés des Etats-Unis en Grande-Bretagne ? Etait-ce difficile de les diffuser auprès des skinheads britanniques ?
Pour moi, les idéaux Sharp sont exactement ce qui représente le vrai skinhead. Il s’agit d’accepter nos racines et le multiracial. Tous les vrais skinheads ont accepté sans problème. Les seuls pour qui ce fut un problème, c’étaient les boneheads racistes.
Que représentait le mouvement Oi ! de votre génération ? Mais surtout quelles étaient ses contradictions ? Car, on le sait, tous n’étaient pas de fervents antifascistes bien au contraire. Comment se fait-il que la frontière soit si ténue ?
La Oi ! est une protestation de la classe ouvrière, ni plus ni moins. Bien sûr, au début, tous les groupes n’étaient pas antifascistes. C’est au moment où les boneheads et leur White Power ont commencé à faire entendre leur bruyante musique que beaucoup de groupes ont adopté une position antifasciste.
Après, beaucoup de groupes ne se sont pas politisés, mais je pense que c’était une erreur car cela soutenait la poussée du White Power. Si plus de groupes avaient opté pour l’antifascisme, ça aurait compliqué les choses pour cette “racaille”.
Quel est le lien entre la culture skinhead et la violence, plus particulièrement 30 ans après l’apogée du mouvement skinhead seconde génération ?
Les jeunes skinheads se battent comme le font tous les jeunes. C’est dans la nature de l’homme de se battre pour se faire une place dans la hiérarchie. Quand tu vieillis, tu t’assagis et tu te bats uniquement pour ce qui est juste. C’est de la violence justifiée.
Quelle vision avez-vous de la culture ouvrière que vous représentez ? Est-ce que le mythe d’un prolétariat uni par de fortes traditions est toujours important à vos yeux ?
Je crois en un socialisme basique. Je pense que les individus de la classe ouvrière devraient voir leurs jours de travail rétribués d’un salaire juste. Beaucoup trop d’argent reste dans les mains d’hommes en costard qui n’ont jamais sué pour survivre.
Aujourd’hui, quel regard portez-vous sur la scène skinhead en Grande-Bretagne ? Est-elle toujours en vie ?
Il y a toujours des bons skinheads, mais la grande partie reste non politisée. La scène est en bonne santé, mais nous devons rester vigilants quant au retour du “White Power”.
Pensez-vous que votre musique puisse être le prescripteur d’une attitude ou d’une façon de résoudre les conflits ?
Je pense que la musique que nous jouons est un simple divertissement, mais j’espère que nos paroles puissent au moins pousser les individus à penser par eux-mêmes.
A l’origine, votre musique, comme beaucoup d’autres qui se veulent contestataires, vient du reggae. Quelle est votre relation avec lui ?
Le reggae est la musique de ma vie. Mon premier et mon dernier amour comme le ska, le rock-steady et la soul.
Pour finir, pouvez-vous nous en dire plus sur votre dernier album, Antifa Hooligans. Y voyez-vous une évolution de votre musique ?
Je pense que notre musique reste identique à ce qu’elle a toujours été, c’est-à-dire, pas de bordel, pas de chipotage, de l’explosion pure. Antifa Hooligans est un hommage à tous les combattants antifascistes du monde.

Antifa festibala

Pour ce festival antifa d’un jour, grande première en Pays Basque Nord, un débat participatif est organisé par Ipar Euskal Herria Antifaxista à partir de 17 heures.

Pour la suite, place à The Oppressed, Tommy Gun, Skakeitan, Street Poison et enfin Tortuga Sound pour finir la soirée.

A la salle polyvalente de Sare.

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